Publié le Jeudi 5 janvier 2023 à 09h00.

Italie : une loi de finances contre les classes populaires

La loi de finances 2023 et d’autres mesures gouvernementales, comme celles qui visent à criminaliser les rassemblements musicaux des jeunes ou les activités d’aide aux migrantEs de la part des ONG, montrent clairement l’orientation adoptée par le gouvernement des droites en Italie.

La loi sur le budget n’est pas seulement une loi capitaliste, comme celles des gouvernements précédents, c’est une loi brutale qui exprime la haine et le mépris de la droite parafasciste envers les classes subalternes. Elle désigne les couches les plus fragiles de la société comme des coupables, essaie de provoquer une guerre entre pauvres afin de créer une masse de prolétaires sans ressources, sans protections et sans organisation, obligés de vendre leur force de travail dans n’importe quelles conditions d’exploitation, non seulement en faveur du grand patronat, mais aussi de la petite et moyenne bourgeoisie ; menacées par la concurrence capitaliste, ces couches rancunières et apeurées constituent précisément la base électorale des droites. La loi vise en outre à restaurer un « ordre réactionnaire » et une idéologie nationaliste, obscurantiste, anti-migrantEs et raciste, selon laquelle chacun doit rester à sa place, dans la position de classe que la ­naissance et le destin lui ont assignée.

Ultralibéralisme

Sur le plan économique, cette loi s’inscrit dans une parfaite continuité avec les politiques du gouvernement Draghi assurant la centralité des intérêts de la grande bourgeoisie, la valorisation du capital et l’accord avec les options néolibérales de l’Union européenne. Les désaccords avec Bruxelles ont en effet été limités : ceux-ci ne concernent pas le dispositif de la loi dans son ensemble mais seulement et partiellement l’utilisation de l’argent liquide et des paiements en ligne, une mesure identitaire que Giorgia Meloni a finalement abandonnée.

La loi sur le budget est principalement financée par la dette : 21 milliards sur un total de 35 milliards constituent une dette supplémentaire (que quelqu’un devra tôt ou tard rembourser) et 21 milliards sont destinés à lutter contre l’augmentation du prix des factures d’énergie. Personne n’a songé à proposer une imposition progressive plus forte sur les gros revenus ou un impôt sur la fortune et le patrimoine.

Au contraire, la part la plus importante du financement de la loi (3,7 milliards d’euros), le gouvernement l’obtient en supprimant les prestations de compensation des retraites qui auraient dû être versées pour défendre les retraitéEs contre l’augmentation galopante du coût de la vie. Un autre milliard a été récupéré en puisant dans le revenu dit de citoyenneté destiné aux couches les plus pauvres de la société ; ce qui démontre que la loi a un caractère d’oppression de classe qui s’abat contre les secteurs les plus faibles de la société ; cette modeste aide de dernier recours a en effet permis d’éviter que des millions de personnes ne meurent de faim. Ils l’ont coupée afin ­d’exploiter davantage la main-d’œuvre.

Dans le même temps, une douzaine de réductions d’impôts substantielles sont introduites pour les entreprises et les travailleurs indépendants, celles-ci sont définies par les gouvernement dans les termes d’une « trêve fiscale » à l’égard de la moyenne et de la petite bourgeoisie.

Et les économies dans les dépenses publiques sont obtenues en sacrifiant notamment les secteurs de la santé et de l’éducation !

La riposte reste à construire

Pour les travailleurEs, on prévoit une réduction de la pression fiscale, c’est-à-dire des impôts sur les salaires, ce qui entraînera une augmentation dérisoire des salaires, de 10 à 20 euros par mois alors que l’inflation a grimpé à 12 % ; celle-ci sera dans tous les cas payée par les travailleurEs à travers la réduction des recettes publiques et donc des capacités de dépense pour les services publics.

Meloni et compagnie ont pu agir en toute impunité parce qu’aucune opposition politique et sociale de masse sérieuse n’a été construite à l’automne, non seulement, sans surprise, de la part des deux principaux partis de l’opposition, le PD (Parti démocrate) et le M5S (Mouvement 5 étoiles), mais aussi du côté des syndicats. La CGIL et l’UIL ont adopté une posture d’observateur passif sauf à la dernière minute quand, histoire de sauver la face, les deux syndicats ont appelé à une grève symbolique de quatre heures qui, tardive et mal organisée, s’est révélée totalement inefficace. Les luttes et les manifestations des syndicats de base ont été combatives mais, compte tenu de leur taille, elles n’ont pas pu avoir un impact sur la dynamique globale.

Dans un contexte où le gouvernement annonce déjà de nouvelles mesures économiques et institutionnelles à caractère anti­social et antidémocratique, il reste beaucoup à faire pour les forces antifascistes et ouvrières.

Traduction H.M.