Publié le Samedi 22 mai 2021 à 18h00.

Freiner le développement urbain des Palestinien·nE·s

Alors que les quartiers juifs de Jérusalem et les blocs de colonies à sa périphérie bénéficient d’un développement important et de financements massifs, Israël fait tout pour empêcher le développement des zones palestiniennes.

Dans le cadre de cette politique, depuis 1967, l’État a exproprié plus d’un tiers des terres annexées à Jérusalem – 24 500 dunams [24,5 km2], dont la plupart sont des propriétés privées de Palestiniens – et y a construit 11 quartiers réservés aux seuls habitants juifs. En vertu du droit international, le statut de ces quartiers est le même que celui des colonies israéliennes ­implantées en Cisjordanie.

Zones inconstructibles

Immédiatement après l’annexion, Israël a annulé tous les plans d’urbanisme jordaniens pour les zones annexées, mais a laissé en place ceux du reste de la Cisjordanie. Cela a créé un vide en matière de planification qui a mis du temps à être comblé. Ce n’est que dans les années 1980 que la municipalité de Jérusalem a élaboré des plans-cadres pour tous les quartiers palestiniens de Jérusalem-Est. La caractéristique la plus frappante de ces plans était la désignation d’immenses étendues de terre comme « zones panoramiques ouvertes » où le développement est interdit. En 2014, après plusieurs modifications apportées aux plans au fil des ans, ces « zones panoramiques » représentaient environ 30 % des terres des quartiers palestiniens. Seuls quelque 15 % des terrains de Jérusalem-Est (environ 8,5 % de la juridiction municipale de Jérusalem) sont zonés pour un usage résidentiel par des résidents palestiniens, bien que les Palestiniens représentent actuellement 40 % de la population de la ville.

Une autre mesure utilisée par Israël pour limiter la quantité de terres disponibles pour les Palestiniens consiste à déclarer des parcs nationaux où le développement est presque entièrement interdit. À ce jour, quatre parcs nationaux ont été déclarés à Jérusalem-Est, à l’intérieur des limites municipales de la ville, y compris sur des terres palestiniennes privées ou sur des terres situées à l’intérieur ou à proximité des zones bâties des quartiers et villages palestiniens. La municipalité de Jérusalem prévoit d’autres parcs à Jérusalem-Est.

Le nombre inhabituellement élevé de parcs nationaux à Jérusalem-Est, dont certains ne contiennent rien d’important sur le plan archéologique ou naturel, indique que – contrairement aux autres parcs déclarés par l’Autorité israélienne de la nature et des parcs – l’objectif de ces parcs n’est pas la conservation. Il s’agit plutôt d’un instrument permettant de fermer de vastes étendues de terres à Jérusalem-Est afin de poursuivre des objectifs politiques tels que la garantie d’une contiguïté exclusivement juive entre la vieille ville et les zones de colonisation, tout en augmentant la présence juive à Jérusalem-Est.

Sous-développement urbain

Dans tous les cas, la municipalité évite systématiquement d’établir des plans de construction urbains détaillés (UBP) – une condition préalable à l’obtention de permis de construire – pour les quartiers palestiniens. En conséquence, les communautés palestiniennes de Jérusalem-Est souffrent d’une extrême pénurie de logements, de bâtiments publics (tels que les écoles et les cliniques médicales), d’infrastructures (y compris les routes, les trottoirs et les systèmes d’eau et d’égouts), de services commerciaux et d’installations de loisirs.

En l’absence de réserves foncières pour le développement, la population palestinienne de Jérusalem-Est – qui a plus que quintuplé depuis 1967 – reste confinée dans des quartiers de plus en plus surpeuplés. Selon les statistiques recueillies par le Jerusalem Institute for Policy Research, en 2015, la densité de population dans les quartiers palestiniens situés à l’intérieur des limites municipales de Jérusalem était presque le double de celle des quartiers juifs : une moyenne de 1,9 personne par pièce et de 1 personne par pièce, respectivement.

Face à cette réalité, les Palestiniens n’ont d’autre choix que de construire sans permis. La municipalité de Jérusalem estime qu’entre 15 000 et 20 000 unités de logement ont été construites sans permis dans les quartiers palestiniens jusqu’en 2004. Un nombre inconnu a été construit depuis, y compris des immeubles de plusieurs étages très denses à l’est de la barrière de séparation. Ces structures font ensuite l’objet d’un ordre de démolition de la part des autorités israéliennes, qui ignorent délibérément le rôle qu’elles ont joué pour mettre les habitants dans cette situation impossible. Des milliers de Palestiniens de Jérusalem-Est vivent sous la menace constante de voir leurs maisons et leurs commerces détruits. Dans de nombreux cas, les autorités mettent cette menace à exécution ou obligent les habitants à démolir eux-mêmes les structures.