Publié le Dimanche 26 juin 2022 à 12h00.

La santé : un enjeu vital pour les trans-pédés-gouines

En termes de santé publique, les LGBTI sont une population clé : de l’épidémie de VIH-sida à celle de la variole du singe (Monkey Pox) en passant par la crise du Covid-19, sans oublier la santé mentale (anxiété, dépression, tentatives de suicide), les LGBTI sont surexposéEs.

Quarante-quatre pour cent des personnes séropositives en France sont des hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes (HSH). Les femmes trans (MtF) sont 66 fois plus à risque d’infection au VIH que le reste de la population1 – notamment les femmes trans racisées. Concernant la santé mentale, dont on a beaucoup parlé ces deux dernières années, la moitié des trans souffrent de dépression, un tiers d’anxiété et près de 30 % des LGBTI ont des problèmes d’addiction2. Près de 40 % des trans3, 2 % des gays et 3 % des lesbiennes4 font une tentative de suicide au cours de leur vie. Les LGBTIphobies restent la première cause de suicide à l’adolescence.

Le capitalisme nous rend malades

On peut expliquer ces très grandes inégalités face à la santé par plusieurs éléments : tout d’abord, la marginalisation des communauté des LGBTI et la violence du système capitaliste. Tous les effets concrets que subissent les personnes LGBTI de par leur oppression ont des conséquence sur la santé : ruptures familiales, sans-abrisme, discriminations à l’embauche et/ou au logement, recours au travail du sexe, isolement, agressions, violences psychologiques, physiques et sexuelles, coûts exorbitants des parcours de transition. Pour autant, alors que nos communautés sont surexposées, l’accès aux soins est précaire : nombreux sont les praticiens ayant des préjugés, refusant le soin, non-formés aux besoins spécifiques des LGBTI, en particulier trans et intersexes. Ces dernierEs sont mutiléEs à la naissance pour les normaliser, sans nécessité médicale. Les politiques de santé publique en termes d’IST (dépistage, campagnes de sensibilisation, ouverture de centres CeGIDD5, accès à la PrEP et au TPE6…) sont largement insuffisantes. Les transitions sont mal remboursées, les chirurgienEs régulièrement payéEs en liquide.

Le manque de praticienEs forméEs et la difficulté d’accès aux traitements conduisent souvent les trans vers l’automédication et les hormones artisanales, ce qui présente des risques pour leur santé en plus de les éloigner des parcours de soin. L’expertise endocrinologique développée n’est pas sans rappeler les pratiques de patientEs-expertEs déjà courantes à Act-Up dans les années sida, où les séropositifEs étaient forcéEs de s’auto-former à leur maladie et leurs traitements, symptôme des lacunes du corps médical.

Aggravation dans la crise du Covid

Ces dernières années, les mesures anti-covid ont été pensées sur le modèle de la famille bourgeoise hétérosexuelle. Rien n’a été fait pour les prostituées : les seules aides ont été portées par des associations. C’est une association trans qui a organisé un fonds d’urgence et des distributions alimentaires pour les aider à survivre. Rien n’a été fait pour les mineurEs LGBTI, confinéEs dans des familles souvent violentes. Rien non plus pour lutter contre l’isolement des LGBTI, dont la sociabilité repose bien plus sur les lieux communautaires que sur le travail ou la famille. La situation de crise sanitaire a repoussé les personnes trans et les séropos hors du cadre médical. Les soins de santé (personnes trans, séropos) ont été reportés.

Tout cela nécessite plus que jamais un véritable service public de la santé : socialisation de l’industrie pharmaceutique, accès universel à la sécurité sociale, 100 % et tiers-payant généralisés, interdiction des dépassements d’honoraires et recrutements massifs de personnels. C’est un enjeu vital.

  • 1. Krishen Samuel, « Trans women 66 times more likely to have HIV, with trans men nearly 7 times more likely, global analysis finds », mars 2022. En ligne sur https://www.aidsmap.com/….
  • 2. American Addiction Centers, « Transgender and Addiction », juin 2022, en ligne sur https://americanaddictio….
  • 3. Ashley Austin, Shelley L. Craig, Sandra D’Souza, Lauren B McInroy, « Suicidality Among Transgender Youth : Elucidating the Role of Interpersonal Risk Factors », avril 2020.
  • 4. National Institute of Health, « Researchers find disparities in suicide risk among lesbian, gay, and bisexual adults », 9 novembre 2021, en ligne sur https://www.nih.gov/news….
  • 5. Centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic.
  • 6. Traitements préventifs contre le VIH.